Couper à la hache dans les dépenses de communication pouvant s’avérer suicidaire, notamment dans une perspective de moyen et long terme, l’évaluation de ces dépenses en période de tensions, voire de crise, devient une impérieuse nécessité. Une évaluation qui doit permettre d’optimiser les engagements financiers et doit, au-delà, être utilisée comme un outil de pilotage et d’aide à la décision.

L’évaluation au service de l’efficacité et de la performance

En période de crise, les vieux réflexes ont souvent tendance à revenir au galop. Car qui dit crise, dit maîtrise des coûts, avec ses corollaires que sont les arbitrages, voire les coupes franches dans certains postes. Et la réduction des dépenses de communication, souvent en première ligne en vertu d’une logique qui veut que l’on se concentre sur l’essentiel, à savoir le business (sic), en fait partie.

Mais, ce faisant, on risque fort de tomber dans le « court-termisme » et, ce faisant, d’obérer l’avenir en négligeant, par exemple, de travailler sur son image et son capital de Marque, si importants lorsqu’une forme de défiance envers les acteurs économiques tend à s’installer.

Il nous semble donc que la démarche à adopter par les organisations en matière d’investissement en communication est celle d’une évaluation systématique des investissements en communication au regard :

  • De leur bonne affectation et de leur efficacité
  • De la cohérence globale des actions menées et des prises de parole
  • De l’adéquation aux besoins et attentes des publics ciblés
  • De l’impact effectif sur les résultats de l’organisation, et donc du retour sur investissement (ROI) sous ses différentes formes

Une évaluation nécessaire, voire même essentielle, mais dont il faut bien constater qu’elle ne fait pas réellement partie des « us et coutumes » de notre pays et reste encore trop peu fréquente.

Communication et marketing : des frontières poreuses

Une forme de frontière est souvent érigée entre communication et marketing, que ce soit dans l’organigramme ou dans les logiques dont elles sont censées relever. S’il s’agit bien de deux volets, et disons-le de deux métiers (expertises) distinct(e)s, il n’y a pas, pour autant, de frontière étanche entre :

  • La communication : ce qui relève du corporate, de la Marque, de la notoriété et de l’image de l’organisme auprès de ses différentes parties prenantes (collaborateurs, clients, adhérents, partenaires, fournisseurs…)
  • Le marketing : ce qui relève de l’offre produits/services, de la relation client, de l’activité et de la performance de l’organisme

Étanche, cette frontière ne peut et ne doit pas l’être ! Les deux doivent bien être articulés, résonnants et cohérents, car ils sont au service d’une même stratégie. Dans le cas contraire, il y a fort peu de chance que l’efficacité et la performance de vos dispositifs soient au rendez-vous !

Ces deux dimensions doivent bien être appréhendées comme un tout, même si elles relèvent de techniques, d’outils et d’équipes distinctes. Car il faut avoir présent à l’esprit qu’elles relèvent, in fine, d’une même démarche et doivent être menées dans un souci de cohérence et de synergies :

  • Cohérence dans les différents messages émis et l’énonciation de la « promesse », qu’elle soit celle de l’organisation ou de son offre de services ou de produits
  • Cohérence dans la relation créée avec les parties prenantes, internes et externes
  • Synergies entre, d’un côté, l’image et, de l’autre, l’offre produits/services
  • Synergies entre les équipes en charge de la communication et du marketing

Une évaluation de plus en plus complexe et multi-factorielle

En matière d’évaluation, force est de constater que les critères et, au-delà, les référentiels sont en train d’évoluer. Elle doit, selon nous, permettre d’apporter des éléments de réponse à des questions structurantes :

  • Comment construire, entre la communication et le marketing, une « chaîne de valeurs » capable de produire un ROI effectif tout en impliquant les différentes parties prenantes ?
  • Comment générer de la différenciation et de la préférence par une démarche multi-factorielle, intégrant l’image, la réputation, le positionnement, l’offre, les services, le relationnel ?
  • Comment structurer les contenus pour que communication et marketing s’enrichissent mutuellement, s’inscrivent dans une cohérence forte et poursuivent des objectifs communs ?
  • Comment intégrer les « critères extra-financiers » qui sont de plus en pris en compte dans le cadre des démarches de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), et doivent depuis une dizaine d’années être reportés dans les rapports de gestion des entreprises ayant au moins 500 collaborateurs et 100 millions d’euros de CA [1].

Le champ de l’évaluation de la communication devient donc de plus en plus large et nécessite de prendre en compte plusieurs réalités :

  • La performance se mesure aussi bien en terme de notoriété, d’image, de relation aux différents publics que de performance des services et/ou produits proposés et il est donc important de créer un lien entre ces différentes dimensions pour leur « donner sens ».
  • Les stratégies et dispositifs, de plus en plus construits et déployés dans une logique « multi-canal » (print, web, réseaux sociaux, présentiel…), produisent de nouveaux modèles qui doivent être étudiés et évalués.
  • L’impact de la communication et du marketing des acteurs privés, publics, associatifs sur leur écosystème global doit être évalué dans son ensemble, avec le souci de s’inscrire dans une logique de responsabilité (il est de plus en plus question de communication responsable).

Il apparaît donc clairement, et c’est ce que nous pouvons voir dans le cadre des missions d’études que nous menons, qu’il n’est donc plus possible d’évaluer en ayant pour référentiel les grilles d’analyse d’hier.

De nouveaux référentiels à inventer

En réponse, l’évaluation nécessite :

  • De développer une démarche d’étude cohérente et globale avec plusieurs volets
    • analyse des besoins et des attentes des différentes parties prenantes (internes et externes)
    • compréhension des déterminants socio-économiques dans les stratégies d’action des différents acteurs
    • génération d’insights consommateurs
  • De mobiliser les différents techniques d’études, et notamment les études qualitatives (focus groups, entretiens, panels…), pour pouvoir sonder finement les déterminants des besoins, des attentes et, in fine, des choix des différents publics.
  • D’optimiser la gestion de la relation client – et, en général, avec les parties prenantes – pour en faire un véritable outil au service de la remontée régulière d’informations.
  • D’articuler fortement les études avec le planning stratégique, et ce très en amont, dès la phase amont de paramétrage des études.

Il est probable, sinon certain, que dans un environnement en forte mutation et caractérisé par un haut degré d’incertitude, la définition de nouveaux référentiels qui permettront d’anticiper et de gérer les évolutions de demain devienne une nécessité.

Cela demandera de prendre du recul et de s’autoriser à interroger son point de vue, sinon ses certitudes, afin d’être en mesure de poser un regard suffisamment ouvert et neuf pour imaginer l’avenir. Car, pour nous, l’évaluation et les études doivent poursuivre un objectif prioritaire : être de véritables outils d’aide à la décision et de pilotage qui vont éclairer, orienter et guider les décideurs sur un chemin bordé d’incertitudes et de risques.

[1] Cf décret relatif n°2012-557 du 24 avril 2012 relatif à la production de rapports d’information extra-financiers et paru au journal officiel du 26 avril 2012, pris en application de la loi Grenelle 2.